L’art de traiter les patients en français
Posted on September 22, 2019« Quand j’ai mal, j’ai mal en français. »
Il est difficile d’imaginer de recevoir des soins médicaux dans une langue étrangère. Dre Crystal Boulianne, une ancienne de l’École de médecine du Nord de l’Ontario, qui espère établir sa pratique médicale après l’été, s’engage à éliminer les barrières linguistiques qui nuisent aux soins des francophones à Kapuskasing. Ses efforts sont si formidables, qu’elle vient de remporter le prix « résidente de médecine de famille 2019 pour son étude des communautés qui souffrent d’inégalités de santé », remis par le Collège de médecin de famille du Canada (CMFC) via la Fondation pour l’avancement de la médecine familiale. Elle va recevoir le prix en novembre, lors du forum de médecine familiale 2019, à Vancouver.
Originaire de la région de Kapuskasing, Dre Boulianne a été élevée en anglais à la maison et a fréquenté l’école élémentaire et secondaire dans le programme d’immersion française. Dès un jeune âge, elle reconnaissait l’importance du bilinguisme dans sa communauté. En travaillant et en vivant dans la région, elle fut inspirée d’apprendre la langue française.
Pendant sa troisième année à l’institution, Dre Boulianne devait faire un stage de huit mois dans une communauté au nord de l’Ontario. Elle a choisi Hearst, une communauté majoritairement francophone, pour s’immerger dans la langue et la culture. Pendant son séjour dans cette petite ville, Dre Boulianne a entrepris un projet de recherche sur les services de santé pour les citoyens ayant trait au système de renvois et de suivis; elle a remarqué un défi important.
Lorsqu’un patient francophone requiert des suivis et est dirigé auprès d’un plus grand centre médical comme Sudbury, Timmins ou Thunder Bay, il n’y a pas de garantie qu’il y aura des services en français. « J’ai entendu des histoires d’horreur de personnes âgées, ayant été redirigées pour des soins dans des villes comme Sudbury, qui y arrivent par ambulance et ne reçoivent pas de services en français. Ils reviennent à Kapuskasing sans avoir compris les instructions qu’ils ont reçues. Les services qui sont disponibles sont-ils vraiment accessibles? » signale Dre Boulianne.
D’après le Comissariat aux services en français, (qui fait maintenant partie du Bureau de l’Ombudsman de l’Ontario), l’offre active assure les services gouvernementaux offert en français. « Pour les utilisateurs du système de santé, l’offre active devient synonyme de sécurité. »
Dre Boulianne est passionnée d’offrir des services médicaux équitables à tous ses patients. Son but ultime est de faire changer la façon dont les médecins de petites communautés francophones transfèrent les patients francophones aux plus grand centres médicaux. Elle veut que les patients aient le choix d’obtenir des services d’un spécialiste francophone.
« On trouve ça drôle, mon mari et moi, et même mes superviseurs, parce que je suis la petite anglophone et c’est moi qui se bat pour assurer les droits des francophones » exclame Dre Boulianne.
Selon Dre Boulianne, il semble que les nuances de la médecine pour les francophones ne sont pas différentes de celles des anglophones. Les problèmes et les inquiétudes sont souvent identiques. Ce qui diffère c’est la planification des soins. En renvoyant des patients francophones vers des professionnels de la santé francophone, la barrière linguistique est éliminée.
Il est difficile d’élaborer une solution concrète pour assurer que tous les citoyens aient accès à des soins de santé qu’ils méritent. La première étape a trait à la sensibilisation des médecins à l’offre active des soins de santé équitables et sécuritaires dans la langue de préférence du patient. C’est aussi une question de renseigner les patients sur leurs droits de recevoir les soins de santé en français, s’ils le veulent. C’est une tâche parfois difficile, mais il est rassurant de pouvoir compter sur des professionnels de la santé comme Dre Boulianne pour éclairer la piste et mener la cause à bien.